28/01/2019

[Album] Bring Me The Hoziron : "Amo"

Groupe : Bring Me The Hoziron
Album : Amo
Sixième Album
Sortie : 2019
Genres : Rock électro, Electro-Pop, Hard Rock
Label : Sony Music, RCA Records
Morceaux à écouter : Wonderful Life, Sugar Honey Ice & Tea, Why You Gotta Kick Me When I'm Down?
♥♥♥
> Stream de l'album sur Youtube <

Métamorphose. Même ceux qui n'aimaient pas le Deathcore que pratiquait Bring Me The Horizon à ses débuts avaient pu apprécier à sa juste valeur le Métalcore gonflé à l'Electro d'un album comme Sempiternal. Avec ce disque, le groupe avait gagné de nouveaux fans mais commençait à faire grincer des dents sa fanbase la plus ancienne. La bande avait ensuite perdu quelques fans de plus avec That's The Spirit et ses expérimentions doucereuses de Rock teinté d'Electro et saucé à la Pop en 2015. Pourtant, dans sa réalisation, ce disque n'avait pas beaucoup de défauts et profitait d'orchestrations plutôt bien foutues le rendant beau et agréable à l'oreille. La grosse déception venait plutôt des prestations vocales d'Oli Sykes qui furent soudainement revues à la baisse et bien trop souvent gonflées au play-back lors des prestations scéniques. D'une façon générale, Bring Me The Horizon a mué au fil des années pour s'orienter vers un nouveau genre, un nouveau style qui a fortement déplu à certains mais réussi par la même occasion à charmer de nouveaux auditeurs. Cette véritable métamorphose (comparable à celle entreprise par Linkin Park au fil de sa discographie jusqu'à un One More Light largement raillé par la critique) semble toucher à son but en 2019 avec Amo, un album qui ne manquera pas de diviser les foules car présentant Bring Me The Horizon sous un jour totalement nouveau.

Music is business. Sortir un album, c'est comme sortir un film dans l'industrie du cinéma : il faut faire de la promo. Et à ce petit jeu, Bring Me The Horizon s'y est plutôt bien pris en restant relativement discret et mystérieux avant la sortie du premier extrait "Mantra" à la fin du mois d'août 2018. Ce premier titre reprenait tous les codes musicaux de That's The Spirit et restait donc dans la continuité de la discographie du groupe, surprenant donc assez peu son monde. Sortir ce morceau en guise de premier extrait semble avoir été mûrement réfléchi maintenant qu'on sait ce que contient le reste de Amo. Il permettait de doucement rassurer les fans du groupe : il reste du Rock et des riffs entêtants capables de faire sauter une fosse en Live dans sa musique. Enchaîner sur "Wonderful Life" en guise de second extrait a été décisif en ce qui concerne les pré-commandes de l'album : plus lourd et plus imposant, ce titre en featuring avec Dani Filth aura sans aucun doute induit les fans en erreur car laissant penser que le groupe allait potentiellement effectuer un léger retour en arrière. Grosse erreur puisque "Medicine"est arrivé, mais "trop tard" pourraient dire certains. Il faut se rendre à l'évidence, Bring Me The Horizon a continué ses expérimentations, s'est aventuré en des terres qui lui étaient encore inconnues, au détriment de ce qu'attendaient les fans mais sans pour autant se prendre les pieds dans le tapis. L'enjeu a donc été de taille mais tout a été bien pensé pour s'assurer d'une part un nombre important de ventes avant même la sortie du disque et d'autre part la possibilité d'attirer tout un nouveau genre de public qui ne connaissait peut-être pas le groupe avant.

Appropriation. On ne va pas mentir : le son et la production sont d'une qualité indéniable. Même le plus poppy des synthés de ce recueil qu'est Amo arrive à charmer l'oreille. Et on ne pourra pas dire que ce qui est présenté dès "I Apologise If You Feel Something" en guise d'introduction du disque ne nous aura pas préparés à la suite. Les comparaisons ne manquent d'ailleurs pas tant les expérimentations de Bring Me The Horizon sont nombreuses et éclectiques sur ce nouvel effort. Il y a de fortes chances pour la bande perde du monde en route mais gagne aussi en popularité auprès d'un nouveau public peu habitué à ses précédents disques grâce à une très bonne maîtrise de son sujet. Car en reprenant les codes de la musique qui a "le vent en poupe" sur les grandes ondes, à savoir l'EDM ("Nihilist Blues") et la Pop bien produite ("In The Dark"), Oli Sykes et sa bande s'aventurent sur les terres d'artistes y régnant déjà en maîtres. Amo s'éloigne d'ailleurs définitivement du Deathcore/Métalcore jusque dans les thèmes abordés : ici, il est question d'amour, comme l'indique le nom de l'album. Tout y est donc plus sucré, plus joyeux. Plus accessible aussi. Et à ce petit jeu, les britanniques n'ont pas à rougir et viennent littéralement piétiner les plates-bandes d'artistes comme Justin Bieber ou de groupes comme Coldplay ("Mother Tongue") ou Twenty One Pilots ("Why You Gotta Kick Me When I'm Down ?"). Clairement, l'état d'esprit d'Oli Sykes (et des autres membres du groupe ?) est différent et ça se ressent dans l'écriture et la composition. Et quand le résultat final est d'une certaine qualité et aussi varié que ce qui est présenté sur ce disque, force est de constater que la prise de risque s'avère être en réalité une simple démonstration du talent et des capacités d'adaptation dont peut faire preuve un groupe de cet acabit.

Ouverture d'esprit ? Bring Me The Horizon s'est-il donc fourvoyé en reniant ses origines Deathcore de façon définitive avec Amo ? Il est toujours très difficile de savoir quoi penser ou dire d'un groupe qu'on a aimé pour sa pratique d'un certain genre musical et le voir ainsi évoluer avec cette sensation de ne plus le reconnaître, de ne plus le suivre, en tout cas pour un temps. Les dés sont pourtant bel et bien jetés et l'album est là, il faut faire avec. Deux choix s'offrent alors à nous : rester dans le passé et dans la posture des haters moyens qui adorent critiquer un groupe pour sa pratique de genres musicaux considérés comme mainstream ou respecter l'approche et le travail opérés par le groupe avec un peu de distance et d'objectivité (si ça existe). On peut ne pas aimer le tournant musical pris par Bring Me The Horizon ces dernières années mais il faut reconnaître au groupe le fait qu'il fait ça plutôt bien. Que les amateurs de Deathcore et Métalcore se rassurent, dans un sens : s'ils se sentaient seuls à écouter Bring Me The Horizon dans leur chambre ou leur casque audio, il y a fort à parier qu'ils se sentiront moins seuls prochainement. Et si cela peut amener des amateurs de Pop ou EDM à se pencher sur la discographie d'un tel groupe et accorder un peu plus d'intérêt à des genres musicaux généralement boudés par le grand public, alors il y aura déjà un gros progrès d'opéré. Bring Me The Horizon est peut-être allé un peu trop vite en besogne pour ses fans de longue date mais ne jetons pas trop hâtivement la pierre à un groupe qui tente de nouvelles choses car passer du Deathcore à ce qui est proposé sur Amo n'est sans doute pas la plus aisée des manœuvres. Contentons-nous plutôt de sourire joyeusement à toutes ces réactions qui ont accompagné la sortie du disque, réactions qui peuvent être résumées en une seule image. Et surtout, pour conclure, écoutons ce disque tel qu'il est, sans toujours vouloir à tout prix le comparer avec ses prédécesseurs, et pour ce qu'il est : un disque agréable, bien produit, avec des textes sympathiques et présentant une large variété de genres musicaux.

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