Artiste : Long Distance Calling
Album : Trips
Cinquième Album
Sortie : 2016
Genre : Rock Progressif, Post Rock
Label : Inside Out Music
Morceaux à écouter : Reconnect,
Trauma,
Plans
♥♥♥♥♥
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On en est où ? Trois ans ont passé depuis l'excellent album
The Flood Inside qui avait fait rentrer Long Distance Calling dans une nouvelle ère avec une bonne moitié des titres de l'effort qui étaient accompagnés de chant. Le public, qui avait manifesté quelques contrariétés face à la présence d'une voix sur des pièces qui auraient pu n'exister qu'en version instrumentale, s'était vu "récompensé" par un EP entièrement instrumental avec
Nighthawk l'année suivante. Mais il faut croire que les allemands ont définitivement décidé de continuer de produire autant de morceaux instrumentaux que de morceaux chantés, la promo de ce cinquième album que voilà se basant sur
une lyrics video pour "Lines" - un titre où on découvrait la voix de
Petter Carlsen - et
un clip pour "Getaway". Le chanteur d'origine norvégienne est d'ailleurs le seul à poser sa voix sur l'album. On notera que Marsen Fischer - qui officiait au poste de vocaliste sur
The Flood Inside - est crédité sur l'album comme s'occupant des synthés et autres arrangements sonores. En bref, pas de changements majeurs mais une nouvelle collaboration, le groupe ayant toujours invité des chanteurs sur ses albums.
Un très bel objet. Il apparaît légitime de se poser la question aujourd'hui quant à l'intérêt d'acheter de la musique en format physique. L'argument premier est évidemment le fait de permettre aux groupes d'exister (ou de survivre, pour certains) mais également d'écouter de la musique avec une plus grande qualité sonore que n'importe quel fichier compressé téléchargé sur Internet. La vente de vinyles a d'ailleurs explosé ces dernières années. Phénomène de mode grâce au pressage de disques de plus en plus beaux grâce à des mélanges de couleurs parfois magnifiques ou réel intérêt pour la musique gravée sur microsillons ? Difficile de trancher mais il faut admettre que cela a au moins l'avantage d'alimenter un marché relativement important et de faire vivre toutes les personnes impliquées dans ce processus. Mais qu'en est-il des CDs, alors ? Long Distance Calling trouve avec
Trips un élément de réponse qui pèse dans la balance. Parce que le packaging de cet album est magnifique, classe, élégant. Les adjectifs ne manquent pas tant
l'objet est singulier : un boîtier sous forme de petit livre broché à la couverture cartonnée avec de très belles photographies en noir et blanc à l'intérieur, les textes pour les morceaux concernés et
un disque intégralement noir imitant un vinyle au format CD (qui rappelle évidemment
l'EP Nukem d'Absded publié selon le même procédé). C'est beau et cela donne incontestablement du cachet à cet album dont le design est travaillé.
Raffinement. Au fil de leur discographie, les allemands n'ont commis aucune erreur notable, devenant en quelques années une référence incontournable de la scène Post-Rock mondiale. Le groupe a exploré beaucoup de choses sur le plan musical avec toujours une influence
floydienne marquée (l'impressionnant "
Flux" et ses douze minutes au compteur en est la preuve parfaite) et un penchant pour le Rock pêchu mais jamais violent (voir "
Momentum" et sa batterie joueuse). Long Distance Calling est une de ces rares formations qui a su évoluer sans jamais se perdre, essayant, expérimentant en proposant un titre chanté sur ses trois premiers albums avec à chaque fois un chanteur différent, preuve que le groupe n'a jamais vraiment fait que de l'instrumental. Avec le temps, ce goût s'est précisé jusqu'à
The Flood Inside et le clou est maintenant enfoncé avec ce
Trips jouant la carte de l'équilibre parfait entre les instruments et une voix en la personne de
Petter Carlsen. Ce cinquième album est un recueil où tout le savoir-faire des allemands se retrouve, que ce soit dans un Post-Rock aux reflets de Synth-Wave ("
Getaway" qui rappelle la musique d'un groupe comme
Toucan), l'art d'un Rock Progressif aux improvisations toujours excellentes ("
Flux") ou des riffs plus nerveux et davantage orientés Métal (le refrain de "
Lines" et sa touche très particulière de Speed/Power-Métal).
Trips est un album raffiné et au contenu varié mettant en relief tout le savoir-faire des allemands pour un résultat des plus appréciables et surtout réussi.
Davantage de chant. C'est le sujet qui fâche. Et qui divise les fans du groupe. Les amoureux du Post-Rock viennent bien souvent chercher dans ce genre de la musique purement instrumentale pour le seul plaisir d'entendre les instruments. Ce sont d'ailleurs les premiers à manifester leur mécontentement lorsqu'un groupe qu'ils ont l'habitude d'écouter décide d'employer un chanteur pour poser des textes sur une de ses compositions. Long Distance Calling ne souffrait pas trop de cela avec seulement trois morceaux chantés sur les trois premiers albums, ces titres faisant davantage office d'expérimentations. Mais
The Flood Inside a largement divisé, certains reprochant la présence d'une voix sur un trop grand nombre de titres de l'albums, d'autres préférant critiquer la prestation vocale de Marsen Fischer qui s'en sortait pourtant pas si mal. Avec
Trips, on a le droit au même son de cloche (il suffit de lire certains commentaires sur Youtube) mais il faut croire que les membres du groupe n'en ont que faire. Et c'est tant mieux ! Surtout qu'il faut bien admettre que le choix de
Petter Carlsen en tant que vocaliste est une bonne idée tant sa prestation vocale sur l'album est réussie. Les qualités de son chant permettent d'apporter une touche de poésie ("
Rewind") et en même temps de puissance ("
Reconnect") qui est un véritable plus pour porter l'ensemble vers des sphères rarement atteintes par Long Distance Calling. Ces morceaux chantés donnent donc du relief à l'album et la combinaison entre son timbre presque efféminé et les compositions du groupe est tout agréable à l'oreille et donc une franche réussite.
L'instrumental au second plan ? Dire que Long Distance Calling s'éloigne peu à peu de ses racines instrumentales est une erreur. Des morceaux tels que "
Trauma", "
Momentum" ou "
Flux" restent des pièces maîtresses de cet album et rappellent que les allemands ont un talent certain pour la production de musique sans chant. L'écoute de ces titres fait véritablement de l'effet sur le corps, partagé entre le frisson de plaisir et le hochement de tête violent provoqué par l'énergie épique parfois libérée. Ainsi,
Trips s'avère n'être rien d'autre qu'un album complet duquel transpire tout le savoir-faire et le talent de la bande qui offre là un condensé de tout ce qu'on a pu entendre sur ses efforts précédents. Notons une petite ressemblance entre le riff d'intro de "
Trauma" - un titre qui aurait très bien pu figurer sur l'album éponyme du groupe - et
"Mein Teil" de Rammstein. Savoureux !
Encore un grand album. Une fois de plus, Long Distance Calling délivre une pépite de Post-Rock et de Rock Progressif. Un recueil qui se déguste et s'apprécie sur la durée, avec toujours des subtilités qui viennent chatouiller les oreilles, tant dans les arrangements sonores que dans ces fameuses notes de guitare en toile de fond qui rappellent que
Pink Floyd est sans aucun doute l'une des références majeures du groupe. Un grand et bel album qui est sans doute l'une des sorties les plus appréciables de l'année 2016.